Christopher Taylor
Calcutta - La persistance de l'oubli
Dans le cadre de la sélection Hors les Murs du festival Les Boutographies - Rencontres photographiques de Montpellier - la Fenêtre présente l'exposition "Christopher TAYLOR - Calcutta - La persistance de l'oubli"
"Le temps, dans les images de Christopher, n'est pas "saisonnier", et encore moins "fugitif" : il n'immortalise pas l'instant avec son appareil photo mais recueille l'aspect le moins mortel et le plus "durable" de la "réalité". La sensation de se trouver au delà de la temporalité m'a frappée et conquise dès la première fois. Les lieux et les regards ne sont pas soumis aux changements d'humeur, au vacarme confus des passants, aux synergies temporaires des rencontres, il s'agit plutôt d'une réflexion épurée qui agit en soustrayant. Le sens de l'histoire et du passé qui intéresse Christopher, imputable peut-être à la nostalgie d'une simplicité "originelle" toujours plus compliquée et corrompue, il l'exprime en repérant et en choisissant quelques symboles immuables, des "emblèmes qui, une fois entrevus, ne peuvent pas s'oublier ni être confondus".
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Lorsque Christopher Taylor photographie les villes, même s’il cherche méticuleusement à éviter la présence des êtres humains qui rendraient reconnaissable l'époque et délimiteraient ainsi la portée de l'image, il privilégie les vestiges qui se réfèrent à des périodes significatives de l'histoire : C'est le cas de "Red Square" à Calcutta. [...]Le "manque de bruit" qui envahit ces lieux bondés et bruyants chaque jour et que le photographe a surpris désert dans de rares occasions, fait naître des sentiments disparates. Ceux qui connaissent ces lieux "pleins" éprouvent une sensation de dépaysement, même en étant accoutumés, plus encore que ceux qui les voient pour la première fois et pensent que c'est son état normal.
Les images de Christopher, même si elles renvoient à la réalité, ne sont ni documentaires ni narratives. Le silence, l'espace qu'elles nous offrent n'ont besoin de rien si ce n'est de leur beauté et de leur nudité pour être significatives, pour être en mesure de susciter des émotions. [...]
Le photographe aime se sentir "en dehors", étranger, détaché des cultures qu'il photographie, peut-être parce qu’il gagne en profondeur et laisse derrière soi son sentiment d'appartenance, dans le sens positif ou négatif du terme, lequel anéantirait sa volonté de "décharner" la réalité laissant voir des os blanchissants."
Monica Dematté
mars 2010